Claudio Parmiggiani né en 1943
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Claudio Parmiggiani né en 1943
Claudio Parmiggiani (né en 1943 à Luzzara, dans la province de Reggio d'Émilie en Émilie-Romagne) est un plasticien contemporain italien associé au mouvement de l'Arte Povera.
Paulin Césari
11/12/2009
"Le Collège des Bernardins – situé à proximité de Notre-Dame de Paris et de la Sorbonne – a accueilli récemment une installation de Claudio Parmiggiani (labyrinthe en verre brisé). Crédits photo : (André Derain)
A Paris, un édifice cistercien du XIIIe siècle, le Collège des Bernardins, est devenu un haut lieu de l'art contemporain. Paradoxe ? Pas si sûr.
L'Eglise catholique et un certain art moderne et contemporain ont en commun une triple certitude : l'invisible existe, il se manifeste dans le visible sans lui être réductible, et cette révélation toujours renouvelée doit être explorée sans relâche. Et ce, sans souci des convenances - par convenance, on entend toute forme obsolète dans laquelle notre entendement limité souhaite emprisonner le mystère. Faire fi des convenances ne veut pas dire envoyer paître l'initiation. Si l'art en général suppose une éducation préalable des sens et de l'esprit, condition nécessaire à toute faculté de distinguer, que dire de l'art du XXe siècle, moderne et contemporain ? Qui peut, sans préalable, prétendre différencier un monochrome de Klein d'un papier peint Vénilia ? Voir l'invisible dans une toile de Kandinsky ? Capter la perception du temps sédimenté dans une affiche lacérée de Jacques Villeglé ? Percevoir le travail de la mort dans les cadavres formolisés de Damien Hirst ?
C'est pourquoi, s'il faut prendre l'art contemporain au sérieux en se donnant les moyens d'y entrer, il faut aussi lui donner les moyens d'apparaître. Cela suppose des lieux privilégiés où le recueillement nécessaire à l'expérience artistique est rendu possible.
Certaines galeries et musées le font avec talent. C'est leur rôle. Rien de surprenant. En revanche, il est un endroit, au cœur de Paris, dont la nature, l'origine et la vocation semblent a priori peu compatibles avec l'art ultra contemporain et qui a pourtant placé ce dernier au cœur de sa mission.
Ce lieu est un bâtiment cistercien du XIIIe siècle. Renouant avec sa vocation première, le Collège des Bernardins, inauguré par Benoît XVI, a rouvert ses portes en septembre 2008. Il se veut espace d'échanges culturels, réservant une place importante à l'art contemporain sans concessions. «Notre fil directeur est la question de l'avenir de l'homme, explique Vincent Aucante, son directeur. Le Collège souhaite une programmation artistique ancrée dans le monde contemporain qui soit une école du regard libre.» L'art contemporain y a donc toute sa place. Depuis leur ouverture, les Bernardins ont accueilli, par exemple, des installations de Claudio Parmiggiani. «Certains lieux ont une énergie, ils palpitent, d'autres pas, résume l'artiste. Si l'on fait un trou dans le mur de n'importe quelle cathédrale du Moyen Age, il en sort du sang ; si l'on fait un trou dans le mur d'un musée, il n'en sort rien.» Ses réalisations (labyrinthe de verre brisé, empreinte spectrale d'une bibliothèque sur un mur, cloches entassées à l'abandon) suscitent l'angoisse de la perte et soulignent le silence de Dieu.
On a pu voir ensuite les recherches picturales de Gérard Titus-Carmel, déconstruisant le retable d'Issenheim afin d'explorer l'entrelacs esprit-matière. Puis, cet automne, une installation-exposition sur le thème de la cellule, réalisée par Nathalie Brevet et Hughes Rochette. Déclinant la polysémie du mot (cellule monacale, carcérale, organique), les artistes ont redéfini l'espace de la sacristie en travaillant les volumes et les lumières. Ils ont ainsi fait apparaître la richesse signifiante (passée et à venir) du lieu et de sa vocation.
Cette association peut paraître déconcertante voire contre nature à tous ceux qui considèrent le catholicisme comme le bastion d'une pensée réactionnaire et l'art contemporain comme la pointe la plus avancée de notre modernité. Pourtant, les points communs existent. La relative ignorance que chacun des protagonistes a de l'autre en est un ! Pour bon nombre de catholiques, l'art contemporain est une immense imposture où règne la subjectivité la plus arbitraire. Et, pour la plupart des amateurs d'art contemporain, le catholicisme reste une doctrine réactionnaire, à la limite de l'obsolescence, dont le rapport à l'art se limite à une instrumentalisation pédagogique de type saint-sulpicien. Or, il faut aller plus loin. Les fidèles sont en général également ignorants de leur propre paroisse. On n'insistera pas sur la connaissance très limitée que la grande majorité des catholiques ont de leur religion. Mais on est tout autant surpris de la connaissance très superficielle que les prétendus amateurs d'art contemporain ont de leur univers. En dehors de quelques banalités rhétoriques sorties des catalogues d'exposition, ils sont en général muets et bien incapables, par exemple, de vous conter la dialectique figuration-non-figuration-transfiguration. L'une des raisons assez piquantes de cette relative ignorance est qu'il y a aussi peu de pratiquants chez les uns que chez les autres et que, dans les deux cas, la fonction décorative a hélas pris le pas sur la réalité substantielle et l'expérience spirituelle.
L'importance de l'expérience
Au-delà des similitudes sociologiques, il existe, entre l'art du XXe siècle et le catholicisme, une parenté plus profonde. Tous deux accordent à l'expérience la même importance car tous deux admettent (pour des raisons différentes) que la matière puisse être spiritualisée : que le verbe se fasse chair dit à tout le moins cela. Et donc que, à travers le visible, celui de l'œuvre ou celui de l'œil, puisse apparaître ou transparaître une vérité autre qui ne se réduise ni aux apparences, surfaces et reflets ni aux conventions toujours provisoires - qu'elles soient sociales ou esthétiques. Tous deux croient donc à une présence en excès qu'il s'agit de manifester et d'explorer, sans se laisser arrêter par une forme ou un genre historiquement déterminé. C'est parce que Kandinsky n'a pas pu trouver dans les formes traditionnelles de la représentation qui l'avait précédé (un moulin hollandais, une vache de Rosa Bonheur, une baigneuse de Renoir, par exemple) le moyen de représenter cet excès de présence, qu'il a inventé l'abstraction. C'est parce que l'incarnation est toujours en train de se réaliser, de se manifester et qu'elle excédera toujours nos représentations, qu'un catholique croira à la nécessité d'en inventer de nouvelles afin de l'explorer et de l'éprouver toujours davantage."
Paulin Césari
11/12/2009
"Le Collège des Bernardins – situé à proximité de Notre-Dame de Paris et de la Sorbonne – a accueilli récemment une installation de Claudio Parmiggiani (labyrinthe en verre brisé). Crédits photo : (André Derain)
A Paris, un édifice cistercien du XIIIe siècle, le Collège des Bernardins, est devenu un haut lieu de l'art contemporain. Paradoxe ? Pas si sûr.
L'Eglise catholique et un certain art moderne et contemporain ont en commun une triple certitude : l'invisible existe, il se manifeste dans le visible sans lui être réductible, et cette révélation toujours renouvelée doit être explorée sans relâche. Et ce, sans souci des convenances - par convenance, on entend toute forme obsolète dans laquelle notre entendement limité souhaite emprisonner le mystère. Faire fi des convenances ne veut pas dire envoyer paître l'initiation. Si l'art en général suppose une éducation préalable des sens et de l'esprit, condition nécessaire à toute faculté de distinguer, que dire de l'art du XXe siècle, moderne et contemporain ? Qui peut, sans préalable, prétendre différencier un monochrome de Klein d'un papier peint Vénilia ? Voir l'invisible dans une toile de Kandinsky ? Capter la perception du temps sédimenté dans une affiche lacérée de Jacques Villeglé ? Percevoir le travail de la mort dans les cadavres formolisés de Damien Hirst ?
C'est pourquoi, s'il faut prendre l'art contemporain au sérieux en se donnant les moyens d'y entrer, il faut aussi lui donner les moyens d'apparaître. Cela suppose des lieux privilégiés où le recueillement nécessaire à l'expérience artistique est rendu possible.
Certaines galeries et musées le font avec talent. C'est leur rôle. Rien de surprenant. En revanche, il est un endroit, au cœur de Paris, dont la nature, l'origine et la vocation semblent a priori peu compatibles avec l'art ultra contemporain et qui a pourtant placé ce dernier au cœur de sa mission.
Ce lieu est un bâtiment cistercien du XIIIe siècle. Renouant avec sa vocation première, le Collège des Bernardins, inauguré par Benoît XVI, a rouvert ses portes en septembre 2008. Il se veut espace d'échanges culturels, réservant une place importante à l'art contemporain sans concessions. «Notre fil directeur est la question de l'avenir de l'homme, explique Vincent Aucante, son directeur. Le Collège souhaite une programmation artistique ancrée dans le monde contemporain qui soit une école du regard libre.» L'art contemporain y a donc toute sa place. Depuis leur ouverture, les Bernardins ont accueilli, par exemple, des installations de Claudio Parmiggiani. «Certains lieux ont une énergie, ils palpitent, d'autres pas, résume l'artiste. Si l'on fait un trou dans le mur de n'importe quelle cathédrale du Moyen Age, il en sort du sang ; si l'on fait un trou dans le mur d'un musée, il n'en sort rien.» Ses réalisations (labyrinthe de verre brisé, empreinte spectrale d'une bibliothèque sur un mur, cloches entassées à l'abandon) suscitent l'angoisse de la perte et soulignent le silence de Dieu.
On a pu voir ensuite les recherches picturales de Gérard Titus-Carmel, déconstruisant le retable d'Issenheim afin d'explorer l'entrelacs esprit-matière. Puis, cet automne, une installation-exposition sur le thème de la cellule, réalisée par Nathalie Brevet et Hughes Rochette. Déclinant la polysémie du mot (cellule monacale, carcérale, organique), les artistes ont redéfini l'espace de la sacristie en travaillant les volumes et les lumières. Ils ont ainsi fait apparaître la richesse signifiante (passée et à venir) du lieu et de sa vocation.
Cette association peut paraître déconcertante voire contre nature à tous ceux qui considèrent le catholicisme comme le bastion d'une pensée réactionnaire et l'art contemporain comme la pointe la plus avancée de notre modernité. Pourtant, les points communs existent. La relative ignorance que chacun des protagonistes a de l'autre en est un ! Pour bon nombre de catholiques, l'art contemporain est une immense imposture où règne la subjectivité la plus arbitraire. Et, pour la plupart des amateurs d'art contemporain, le catholicisme reste une doctrine réactionnaire, à la limite de l'obsolescence, dont le rapport à l'art se limite à une instrumentalisation pédagogique de type saint-sulpicien. Or, il faut aller plus loin. Les fidèles sont en général également ignorants de leur propre paroisse. On n'insistera pas sur la connaissance très limitée que la grande majorité des catholiques ont de leur religion. Mais on est tout autant surpris de la connaissance très superficielle que les prétendus amateurs d'art contemporain ont de leur univers. En dehors de quelques banalités rhétoriques sorties des catalogues d'exposition, ils sont en général muets et bien incapables, par exemple, de vous conter la dialectique figuration-non-figuration-transfiguration. L'une des raisons assez piquantes de cette relative ignorance est qu'il y a aussi peu de pratiquants chez les uns que chez les autres et que, dans les deux cas, la fonction décorative a hélas pris le pas sur la réalité substantielle et l'expérience spirituelle.
L'importance de l'expérience
Au-delà des similitudes sociologiques, il existe, entre l'art du XXe siècle et le catholicisme, une parenté plus profonde. Tous deux accordent à l'expérience la même importance car tous deux admettent (pour des raisons différentes) que la matière puisse être spiritualisée : que le verbe se fasse chair dit à tout le moins cela. Et donc que, à travers le visible, celui de l'œuvre ou celui de l'œil, puisse apparaître ou transparaître une vérité autre qui ne se réduise ni aux apparences, surfaces et reflets ni aux conventions toujours provisoires - qu'elles soient sociales ou esthétiques. Tous deux croient donc à une présence en excès qu'il s'agit de manifester et d'explorer, sans se laisser arrêter par une forme ou un genre historiquement déterminé. C'est parce que Kandinsky n'a pas pu trouver dans les formes traditionnelles de la représentation qui l'avait précédé (un moulin hollandais, une vache de Rosa Bonheur, une baigneuse de Renoir, par exemple) le moyen de représenter cet excès de présence, qu'il a inventé l'abstraction. C'est parce que l'incarnation est toujours en train de se réaliser, de se manifester et qu'elle excédera toujours nos représentations, qu'un catholique croira à la nécessité d'en inventer de nouvelles afin de l'explorer et de l'éprouver toujours davantage."
Chrysemyde- Membre Vénérable de l'Opale
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Date d'inscription : 19/08/2008
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